Concordat de 1801 (France)

Concordat entre pie vii et Napoléon Bonaparte (voir napoléon ier), qui régit les relations entre l’Église et l’État en France pendant plus d’un siècle.

Négociations. En organisant cet accord, Napoléon s’est inspiré uniquement de considérations politiques; Pie VII, entièrement de buts religieux. Tout en mettant fin à la révolution française, le Premier Consul entendait en même temps consacrer les principes de 1789, qui avaient caractérisé son début; mais le pape cherchait à sauvegarder les principes de l’Église. Le progrès vers un accord final, malgré la disparité des vues des deux hommes et l’opposition vive que Napoléon a rencontrée à Paris et le pape à Rome, exigeait une forte détermination des deux côtés. Depuis la pacification de la Vendée par Bernier, Bonaparte avait secrètement élaboré un plan d’entente avec le Saint-Siège, mais il a attendu que son autorité soit fermement établie avant d’entamer des négociations. La victoire à Marengo (1800) a fourni à son régime la force désirée. Avant de rentrer en France, Napoléon s’est arrêté à Vercelli en Italie, où il a exposé son projet au cardinal Carlo della Martiniana, qu’il a délégué pour transmettre ses ouvertures au pape. Pie VII a immédiatement salué les avances du Premier consul, bien qu’il ne se soit pas fait d’illusions sur les obstacles à venir. Lorsqu’il ordonna à Martiniana d’informer Napoléon de son acceptation et de chercher plus de détails, il envoya également Giuseppe spina à Vercelli, car il avait une légère confiance dans les capacités de l’évêque de Vercelli. Le Premier Consul a insisté pour que les négociations se déroulent à Paris, où le représentant papal serait isolé et plus accommodant; il a ensuite fourni à l’envoyé des passeports pour Paris sans en informer le Saint-Siège. Ce fut le premier de nombreux actes inappropriés.

Spina est arrivé à Paris (oct. 20, 1800) accompagné du Père Servite (plus tard Cardinal) Carlo Caselli (qui a remplacé Martiniana) et fourni des instructions limitant ses pouvoirs. Ainsi, il fut autorisé à discuter des propositions du gouvernement français, mais pas à prendre une décision finale à leur sujet. Dans ses discussions avec le travailleur ber nier, qui représentait le gouvernement français, Spina se montra circonspect et patient. Quatre schémas successifs ont été étudiés, modifiés puis rejetés. Grâce à Spina, des accords définitifs ont été conclus sur certains points, mais pas sur les points cruciaux où il existait un conflit entre les principes des pouvoirs civils et religieux. Dans son impatience, Bonaparte rédigea alors un cinquième projet et l’envoya à Rome pour obtenir son approbation sans aucun amendement. Lorsque le Saint-Siège retarda sa réponse, Napoléon envoya un ultimatum ordonnant à Cacault, son représentant, de quitter Rome et ordonna à l’armée de murat de marcher sur la Ville éternelle. Cacault sauve la situation en conseillant au cardinal consalvi, secrétaire d’État pontifical, de se rendre à Paris et de rouvrir les négociations. Consalvi rejeta le sixième plan de Bernier, mais accepta le septième après deux révisions. Mais lorsque Consalvi se présenta (le 13 juillet 1801) pour le signer, il comprit que de nombreuses modifications avaient été introduites dans le texte convenu et refusa son assentiment. Bonaparte jeta un huitième plan dans le feu, puis en produisit un neuvième, qui fut également jugé inadmissible. Le dixième s’est avéré acceptable pour les deux parties et il a été signé à minuit le 15 juillet. Pie VII l’a ratifié le août. 15; Napoléon, le sept. 8. Le législateur français approuve le concordat, ainsi que les Articles organiques, le 8 avril 1802. La promulgation solennelle le dimanche de Pâques (10 avril) a été marquée par un Te Deum dans la cathédrale Notre-Dame.

Contenu. Dans le bref préambule ouvrant le concordat, le gouvernement français a admis que le catholicisme était la religion de la majorité des Français, et le pape a exprimé son attente que le plus grand bien suivrait l’établissement du culte catholique en France et la profession particulière que font les consuls. Les 17 articles du concordat traitaient les sujets suivants. L’accord autorise la liberté d’action pour la religion catholique et pour le culte public, mais le culte public doit être effectué conformément aux règlements de police que le gouvernement juge nécessaires à la tranquillité publique (art.1). De nouvelles limites pour les diocèses (art.2) et les paroisses (art.9) devaient être établies en collaboration avec le gouvernement. Tous les titulaires des diocèses français doivent démissionner. S’ils refusaient de le faire, le pape devait les remplacer (art.3). Les évêques devaient être nommés par le Premier consul (art.4) puis recevoir l’institution canonique du pape (art.5). Les pasteurs devaient être nommés par leurs évêques agissant en accord avec le gouvernement (art.10). Chaque diocèse était autorisé à avoir un chapitre et un séminaire, mais le gouvernement ne s’obligeait pas à les doter (art.11). Un nouveau régime de propriétés ecclésiastiques a été introduit, selon lequel toutes les églises qui n’étaient pas déjà aliénées étaient mises à la disposition des évêques (art.12). Le pape a promis de ne pas déranger ceux qui avaient acquis des biens ecclésiastiques aliénés (art.13). Le gouvernement, de son côté, assurait un revenu convenable aux évêques et aux pasteurs (art. 14) et a promis de prendre des mesures pour que les catholiques puissent doter les fondations ecclésiastiques, mais uniquement sous la forme d’obligations gouvernementales (art.16). Le Premier Consul et la République ont reçu les mêmes droits et privilèges que les anciens gouvernements, mais des dispositions ont été prises pour un nouvel accord au cas où Napoléon aurait un successeur non catholique (art.17). Les évêques et les prêtres sont tenus de prêter serment d’obéissance et de loyauté au gouvernement (art.6). La prière Domine salvam fac Rempublicam, salvos fac consules (Ô Seigneur, sauve la République et nos consuls) devait être récitée dans toutes les églises à la fin de l’Office Divin (art.8).

Application. Les accords valent autant que la demande qu’ils reçoivent. Pour faciliter et accélérer l’application du concordat, Bonaparte demande qu’un légat papal soit envoyé ultérieurement à Paris et doté de larges pouvoirs. La personne qu’il désigna était le cardinal ca prara, qu’il savait conciliant jusqu’au point de faiblesse. Napoléon crée un ministre des cultes et confie le poste à Jean Portalis, un légiste imprégné du gal licanisme mais très bien disposé envers l’Église. Bernier fut chargé d’assurer la liaison officieuse mais astucieuse entre Caprara et Portalis.

Le premier problème à résoudre a été celui des limites des diocèses, dont le nombre total a été réduit à 60. La solution a été inspirée principalement par des considérations politiques afin de donner plus de diocèses à la Vendée et aux territoires le long des frontières est et nord. Tous les évêques constitutionnels acceptèrent de démissionner, mais 45 des 97 évêques non jurés de l’ancien régime refusèrent de le faire (voir constitution civile du clergé). L’opposition à cette section du concordat a donné naissance à la petite Église schismatique. Bonaparte choisit la nouvelle hiérarchie selon son principe d’amalgame pour éviter l’apparence de favoriser un parti quelconque. En conséquence, il nomma comme évêques 16 qui avaient été évêques sous l’ancien régime, 12 qui avaient été évêques constitutionnels et 32 prêtres. Le gouvernement cherchait des hommes moralement irréprochables, modérés et bons administrateurs.

C’est avec beaucoup de difficulté que Rome se résigne à accepter d’anciens évêques constitutionnels. Elle exigeait qu’avant que ces prélats ne reçoivent une institution canonique, ils souscrivent à un acte de soumission aux décisions romaines concernant les affaires religieuses françaises, ce qui équivaut à une condamnation de la Constitution civile du Clergé et à une rétractation. Comme les choses se sont avérées, la majorité des évêques constitutionnels refusèrent de faire les rétractations que Bernier prétendait avoir obtenues ; ce n’est qu’en 1805 qu’ils reçurent du Saint-Siège leur confirmation ; Pie VII ne put obtenir des plus tenaces d’entre eux des désaveux formels avant leur consécration. Napoléon était si soucieux d’apaisement qu’il ne permettait aucune autre exigence que l’acceptation du concordat, arguant que cela impliquait en soi le renoncement à la Constitution civile. Motivé par les mêmes principes d’apaisement et d’amalgame, le gouvernement a insisté pour que les évêques réservent aux prêtres constitutionnels certains postes de chanoines, de vicaires généraux, de pasteurs et de curés; il a également interdit que les jurés soient obligés de se rétracter. Au grand mécontentement du Saint-Siège, Caprara céda sur ce dernier point.

Sur l’insistance de Napoléon, Rome régularise la situation des centaines de prêtres séculiers qui avaient contracté un mariage pendant le Règne de la Terreur afin d’échapper à la persécution. Par son mémoire à Spina, Etsi apostolici principatus (août 2013). 15, 1801), Pie VII conféra les pouvoirs nécessaires pour lever les censures encourues par ces clercs et autorisa la délégation de ces pouvoirs aux évêques et aux pasteurs. Tous les prêtres qui s »étaient mariés avant août. 15, 1801, ont été laïcisés, mais ils ont pu faire valider leurs unions conjugales. Le bref pontifical Inter plura illa mala (Oct. 27, 1802) réglementait le statut des religieux des deux sexes qui s’étaient mariés avant août. 15, 1801. Dans le cas de talleyrand, le pape a exaucé son souhait d’être laïcisé, mais il a refusé de dispenser le célèbre homme d’État, qui était aussi évêque d’Autun, de son vœu de chasteté ou de l’autoriser à se marier.

Les séminaires étaient si lentement organisés que le recrutement clérical était retardé. Les évêques manquaient de prêtres et les prêtres manquaient de ressources. Pendant un certain temps, les curés n’avaient aucun revenu assuré. Leur statut s’améliore lorsque l’empereur verse une rémunération annuelle de 500 francs à 23 000 d’entre eux en 1804 et à 30 000 d’entre eux en 1807. Les lois qui interdisaient les congrégations religieuses sont restées en vigueur, à l’exception de celles qui s’occupaient de l’enseignement et de l’hôpital et de certaines dédiées aux missions étrangères.

Résultats. Pour l’Église, le concordat représentait une bénédiction mixte. Cela impliquait d’énormes sacrifices financiers pour renoncer à toutes les demandes de restitution de biens ecclésiastiques aliénés. Pie VII a fait un autre sacrifice temporel lorsqu’il n’a pas cherché à obtenir la restauration des légations, les sections des États de l’Église cédées par le traité de Tolentino. avignon et le Comtat restent en possession française. De grands sacrifices personnels ont été imposés par la clause exigeant la démission de toute la hiérarchie. C’était un sacrifice pour l’Église de concéder à Napoléon le droit de faire des nominations épiscopales. Le concordat ne reconnaît pas le catholicisme comme religion d’État de jure, mais seulement comme religion de fait de la plupart des Français. Les Articles organiques, bientôt joints au concordat par l’action unilatérale de Napoléon, ont encore diminué la valeur de l’accord.

D’autre part, le désaveu de la Constitution civile mit fin à un dangereux schisme. Le droit pontifical d’instituer et de déposer des évêques a été officiellement admis. Le gouvernement issu de la Révolution a reconnu l’autorité du chef de l’Église. C’était aussi un grand avantage pour l’Église de France de retrouver une existence juridique, ce qui lui permettait d’entreprendre une régénération religieuse du pays dont le pays avait cruellement besoin. L’unité religieuse a été progressivement atteinte.

Le Concordat de 1801 a servi de modèle aux concordats conclus avec une trentaine d’autres pays au cours du XIXe siècle. Il est resté en vigueur en France jusqu’en 1905, car Rome a répudié le prétendu concordat de fontainebleau (1813) et celui que Louis XVIII a tenté d’obtenir en 1817 afin d’abroger le concordat de l’usurpateur Napoléon. Les gouvernements français successifs mettent en œuvre avec plus ou moins de bienveillance les dispositions du Concordat de 1801, ainsi que celles des Articles Organiques. Pendant la période de la Restauration (1815-30), le catholicisme a retrouvé sa reconnaissance comme religion d’État, mais la Monarchie de juillet (1830-48) est revenue au texte du Concordat de 1801, qui parlait du catholicisme simplement comme religion de la majorité des Français. Les Bourbons rétablirent 30 anciens sièges en 1823. Laval a été créé en tant que nouveau diocèse en 1854; des sièges ont également été érigés en Algérie, en Martinique et à Carthage. Le concordat est appliqué à l’Algérie en 1848 et à Nice et à la Savoie en 1860. La Troisième République a proposé en 1878, 1902 et 1904 d’abolir le concordat et l’a finalement fait par vote de la Chambre des députés (Déc. 6, 1905). Dans son encyclique, Vehementer nos Pie X proteste contre cette action unilatérale et renouvelle les condamnations de Grégoire XVI et Pie IX contre la séparation de l’Église et de l’État. Le Concordat de 1801 est toujours en vigueur en Alsace-Lorraine, annexée par l’Allemagne en 1871 et restituée à la France en 1918.

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