Les résultats d’une analyse de l’alimentation des gorilles dans la Réserve de Lopé, Gabon sont présentés. Des échantillons ont été analysés pour rechercher des nutriments et des composés secondaires végétaux (phénols totaux, tanins condensés et alcaloïdes) dans le but d’expliquer le choix alimentaire des gorilles. Le régime alimentaire est le plus diversifié analysé jusqu’à présent pour les gorilles; il semble s’agir d’un équilibre entre les fruits sucrés, les feuilles protéinées et les tiges relativement fibreuses. La plupart des fruits et des tiges herbacées sont succulents, mais certains fruits et écorces plus secs et fibreux sont également consommés. Les graines sont une autre composante de l’alimentation, y compris les graines non mûres. Les fruits, les graines, les feuilles et l’écorce peuvent tous contenir des niveaux très élevés de phénols totaux et de tanins condensés; mais toutes les tiges herbacées testées contiennent de faibles niveaux de ces composés. Les alcaloïdes ne sont apparemment pas un composant important des aliments pour gorilles et peuvent être évités. Les gorilles de Lopé ont tendance à éviter les fruits gras et à sélectionner des feuilles riches en protéines et pauvres en fibres par rapport à la végétation générale. Lorsque les fruits et les jeunes feuilles préférées sont rares, les écorces protéinées et les feuilles matures, ainsi que la moelle sucrée, sont d’importantes sources de nutriments. Nous concluons que les gorilles exploitent la large niche des frugivores dans les forêts de plaine d’Afrique de l’Ouest et y font partie de la communauté des frugivores. Ce qui les distingue, c’est leur capacité à manger de gros fruits fibreux, des feuilles et des tiges matures et à surmonter des niveaux élevés de composés phénoliques (nous utilisons « composés phénoliques » comme terme générique pour les phénols totaux et les tanins condensés). Le régime des gorilles à Lopé chevauche grandement celui des primates sympatriques, frugivores, et ressemble plus à celui des chimpanzés qu’à celui des gorilles étudiés ailleurs en Afrique.